Evasion des devises: Ces sociétés d'expatriés qui pillent le Cameroun

Yaoundé, 02 septembre 2013
© Boris Annelle Mbock | La Nouvelle

 

Arab Contractors, Elat Le Gravier, Essasock, Gracam, Ferreira et Scpg Libanais, malgré les bénéfices tirés de l'exploitation du gravier, privent le trésor public, selon des sources bien introduites, de la contrepartie en termes des impôts (Tva). Un manque à gagner qui se chiffre à des milliards de FCFA. Les services régionaux des Impôts de la région du Centre et du Littoral, le Ministère des Mines, de l'Industrie et du Développement Technologique et ses démembrements régionaux de la région du Centre et du Littoral au cœur des magouilles. La Commission nationale anti-corruption (Conac) et la direction générale des Impôts interpellées. Enquête.

 

 

Malgré cet épais nuage de poussière qui entoure l'exploitation des carrières au Cameroun, il s'avère que la vente de gravier constitue une véritable mine d'or qui alimente profusément les circuits ténébreux d'évasion fiscale. Il n'en saurait être autrement, estiment certains observateurs proches de ces milieux qui indiquent que la forte demande des différents types de graviers (0/5, 5/16, 16/25, 0/31,5, moellons, 6,3/10) dans la construction des bâtiments et autres grands chantiers a favorisé l'implantation de ces carrières tenues en majorité par des expatriés. C'est ainsi que dans la région du Centre, Arab Contractors, Bat Le Gravier, Essasock et Gracam font office de figures de proue, tandis que du côté du Littoral, Ferreira (société portugaise) et Scpg Libanais se déploient comme de véritables requins en haute mer. Alors question: que gagne le trésor public dans ce commerce qui rapporte gros? Pas grand-chose. Et la preuve ? Un document adressé en très haut lieu et dont nous avons pu obtenir copie fourmille de détails sur les ventes effectuées par toutes ces sociétés dans la période allant du mois de janvier au mois d'août 2013. Il est question, selon nos sources, d'attirer l'attention de la haute hiérarchie de l'Etat sur cette activité qui prive l'Etat de précieuses retombées fiscales. 

Dans les entrelacs de cette nébuleuse, certaines langues indiquent que les promoteurs de ces carrières qui bénéficient des complicités dans les services régionaux des Impôts de la région du Centre et du Littoral et au ministère des Mines, de l'Industrie et du Développement technologique, se cachent le plus sauvent derrière les projets gouvernementaux qui leur exemptent des taxes, pour s'engraisser. Les produits sortis des différentes carrières prennent alors, le plus souvent, les routes de l'informel. Plus grave, l'on indique même que le laxisme des responsables du ministère des Mines, de l'Industrie et Développement technologique serait à l'origine de l'entrée incontrôlée des explosifs utilisés dans ces carrières sur le territoire camerounais. Une véritable source d'insécurité... Quant aux bénéfices proprement dits engrangés par ces exploitants de gravier, on découvre que dans la période allant de janvier 2013 au mois de juillet dernier, la société Arab Contractors qu'on retrouve beaucoup dans les chantiers routiers au Cameroun, s'est bien frottée les mains. 133120 tonnes de gravier 0/5 écoulées dans des circuits non maîtrisés (3 500 FCFA la tonne); 66150 tonnes du gravier 5/16 écoulées (13500 FCFA la tonne); 45774 tonnes du gravier 16/25 (13500 FCFA la tonne); 23670 tonnes de 0/031,5 (12 000 FCFA la tonne), 10 872 tonnes de moellons (la tonne revenant à 8500 FCFA) ; 68 004 tonnes de gravier 6,3/10 (16 000 FCFA la tonne). Calculette à la main, la société égyptienne s'en tire avec une rondelette somme de 3.441.410.000 FCFA sans donner un centime à l'Etat. 


Nid de la corruption 

La société Elat Le Gravier en ce qui la concerne est loin d'être le petit poucet dans cet océan de pillage sous les tropiques. Entre janvier 2013 et le mois de juillet dernier 34620 tonnes de gravier 0/5 ont été écoulées (à raison de 4 000 FCFA la tonne); le gravier 5/16: 27.288 tonnes (pour 13500 FCFA la tonne); le gravier 16/25, 19 638 tonnes (13500 FCFA la tonne) ; 7 740 de tonnes de gravier 0/31,5 pour 12 000 FCFA la tonne); 306 tonnes de moellons (à raison de 8500 FCFA la tonne); 90 tonnes de gravier 6,3/10 (la tonne revenant 16 000 FCFA). Total: 868.902.000 FCFA dans la cagnotte. Les chiffres à l'actif de la société dénommée Essasock. 65 600 tonnes de gravier 0/5 placées (3 500 FCFA la tonne), 54 288 tonnes de gravier 5/16 (14 000 FCFA la tonne). Le compteur de la société Gracam affiche de son côté de janvier A juillet 2013, 12 880 tonnes placées (3 500/tonne); gravier 5/16, 40 566 tonnes (A raison de 14 500 FCFA la tonne): gravier 16/25, 23 378 'tonnes de gravier (14 000 FCFA), gravier 0/31,5,2 970 tonnes (à raison de 13 500 FCFA la tonne); moellons, 198 tonnes (la tonne est vendue à 8 000 FCFA). La petite addition de ce qui est tombé dans les comptes de cette société s'élève A 1 002 258 000 FCFA. 

Dans la région du Littoral où les Portugais de Ferreira ont trouvé matière à exploiter, les affaires vont plutôt bien. Tenez: 51 800 tonnes de gravier 0/5 vendues (1 000 FCFA la tonne); 70 182 tonnes de gravier 5/16 écoulés (à raison de 15 500 FCFA la tonne); 63 018 tonnes de gravier écoulées (à raison de 14 500 FCFA la tonne); 4 406 tonnes de gravier 0/31,5 (la tonne revenant à 5 000 FCFA); 54 tonnes de moellons livrées mais non payées ; gravier 6,3/10, Néant. Toutefois les Portugais de Ferreira vont faire un chiffre de 2 075 412 000 FCFA. Quant aux Libanais, la vente de gravier leur a rapporté dans la période janvier-août 2013 la somme totale de 1.101.425.000 FCFA répartis comme suit: 41 360 tonnes de gravier 0/5 (1 000 FCFA la tonne); gravier 5/16, 40 068 tonnes (14 500 FCFA la tonne): gravier 16/25, 26 046 tonnes (b raison de 13 500 FCFA la tonne) gravier 0/31,5, 25 416 tonnes (5 000 FCFA); moellons 54 tonnes (7 000 FCFA le prix d'une tonne); gravier 6,3/10, Néant. Des chiffres et des chiffres où malheureusement n'apparaît aucune trace du paiement de la Tva à l'Etat camerounais. Pour en savoir davantage sur ce nid de la corruption, un doigt accusateur est pointé sur les hauts responsables de la délégation régionale des Impôts du Centre et du Littoral et ceux de la direction des Mines au ministère des Mines et du Développement technologique. Toutes nos tentatives de joindre les intéressés sont restées vaines, notamment à la direction des grandes entreprises de la Dgi où ces mastodontes sont supposés traiter leurs dossiers fiscaux. Tout comme les responsables des sociétés incriminées. Affaire à suivre.


02/09/2013
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